Patriiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiick !
Le 17 mars, on fête la St Patrick, jour férié en Irlande parce que c'est la fête nationale.
C'est une journée importante pour les irlandais, et pour la communauté irlandaise dans le monde (notamment à New York) ; le vert étant une couleur symbolique, on s'habille en vert (au moins un vêtement), on organise des parades, et les jusqu'auboutistes boivent de la bière colorée en vert.
Patrick n'est pas irlandais : Patricius Magonus Sucatus naît on ne sait trop quand (vers 400) et on ne sait trop où (Ecosse ? Pays de Galles ? France ?), mais de parents romains. A l'âge de ses premiers boutons, le voilà qui se fait enlever par des pirates qui le vendent comme esclave en Irlande.
Après une jeunesse mouvementée au cours de laquelle il devient le disciple de St Germain l'Auxerrois, il est promu évêque et chargé d'évangéliser l'Irlande. Aux paysans païens qu'il rencontre, il faut dire les choses simplement. Alors pour parler de la Trinité, il se baisse et cueille un trèfle (à trois feuilles le trèfle, Patrick !). Idée géniale qui le fait passer à la postérité : St Patrick devient le St patron de l'Irlande et le trèfle un symbole national.
Le trèfle
En latin, trifolium, trois feuilles. En français : trèfle. Pas plus compliqué que ça.
Mais en anglais.... ils ont trois mots nos voisins ! Trefoil, qui vient du latin ; clover, qui vient du germanique (non, ce n'est pas un mot japonais) et shamrock qui vient du celtique (seamróg en gaélique irlandais). (Vous aimez les trèfles ?)
Les celtes, vous connaissez ? Les rois des noeuds... Il n'en fallait pas plus pour qu'ils inventent le noeud de trèfle (ou noeud celtique).
Ce noeud celtique est en fait le bord d'un ruban de Moebius avec 3 demi-torsions. Je vous laisse regarder de superbes illustrations de ce trèfle particulier ici, dont une par Escher. Et si vous voulez apprendre à dessiner des entrelacs, c'est par là !
Les vikings avaient un noeud semblable, le noeud d'Odin, ou noeud des tués, décliné en triangle. On le voit sur le bateau viking d'Osenberg qui date du IXème siècle ou encore sur la pierre de Larbrö sur l'île de Gotland qui recèle de nombreuses autres pierres runiques (même époque).
En fait ces noeuds cousins ressemblent aux anneaux de Borromée, autre figure mathématique qui montre 3 anneaux enchevêtrés ; mais il faut considérer les anneaux par groupe de deux face au troisième : les trois anneaux pris isolément ne sont pas liés les uns aux autres, il suffit d'en couper un pour que les deux autres soient libérés. Les anneaux de Borromée ne sont pas un noeud : en mathématique le noeud est une courbe fermée, ici, on en a trois.
Le triskel
Les Celtes étaient habitués aux triades. Le triskel fait donc partie de leur culture, mais il était aussi présent chez les vikings. Et quel drôle de symbole...
Le triskel, triscèle ou triskèle (triskell en breton) puise son origine étymologique dans le grec : tri-skelès qui veut dire "trois jambes". On en trouve deux représentations : soit un dessin de trois jambes réunies, soit un ensemble de trois spirales.
Le triskel "spirale"
Il s'agit d'un symbole celte par excellence, mais il existe en fait depuis le mégalithique. Il s'agit certainement d'un symbole solaire. Le triskel représente le mouvement, la vie et l'évolution, et pourrait symboliser l'enfance-l'âge adulte-la vieillesse, ou bien l'esprit-l'âme-le corps, le passé-présent-futur ou encore les trois dieux principaux du panthéon celte. Il est toujours resté très vivace en Irlande, alors qu'il n'est "redécouvert" que vers 1920 en Bretagne qui en a fait un de ses symboles.
Mais que dire de ces figures ?
A gauche, un motif datant de 3 200 ans av JC, sur le site de Newgrange en Irlande, et à droite, une gravure rupestre du Tassili N'Ajjer en Algérie, datant de 5 à 6 000 ans av JC - les deux sites sont inscrits au "patrimoine mondial" de l'Unesco.
Et là, un "triskel" à 4 spirales sur une pierre runique de l'île de Gotland
(un trèfle à quatre feuilles viking ?)
Le triskel "jambes"
Egalement très ancien, il apparaît très tôt dans de nombreuses cultures à travers le monde, mais les deux plus connus sans doute sont ceux de l'île de Man et de la Sicile.
drapeau et armoiries de l'île de Man
Ce sont peut-être les vikings qui ont apporté ce symbole dans l'île de Man (colonisation au IXème siècle), car il existait dans la culture scandinave, mais le triskel n'apparaît dans les armes de l'île que vers le XIIIème siècle, après leur départ.
En Sicile, le triskel est un peu particulier (on parle plutôt de trinacria, lit. "trois pointes", nom donné par les grecs à l'île) : ce sont trois jambes nues surmontées d'une tête de Méduse ailée, et coiffée de serpents. Déjà présent sur des monnaies grecques datant du IIIème siècle av JC et retrouvées à Syracuse, ce symbole est depuis toujours lié à la Sicile et devient l'emblème du Royaume-des-deux Siciles avant d'être incorporé au drapeau. Son origine serait grecque, ou phénicienne ou encore minoenne.
La similitude du triskel et de la trinacria font que certains y voient une influence normande : les normands (des vikings à l'origine) ont envahi la Sicile en 1060, et y ont créé un royaume très prospère. Les liens très étroits qu'entretenaient le normands de Sicile et les normands d'Angleterre auraient contribué à introduire la trinacria dans l'île de Man ? (Petit rappel : les normands de Normandie sont très vite devenus les rois d'Angleterre).
Autres exemples : le triskel dans les armoiries de la ville de Döhlau en Bavière, et dans une église estonnienne du XIVème siècle
Mon triskel à moi
Pas encore commencé, mais c'est imminent : un petit Fair isle de ma composition, prêt depuis 3 ans. Je l'avais appelé Triskell, et comme je suis dans les celtes et les vikings en ce moment, autant continuer sur ma lancée !
Mes noeuds celtiques à moi
Barraíocht est terminé. Avec 6 écheveaux de Soft Shetland, j'ai eu assez pour rajouter une capuche à mon 3/4 ans. J'adore tricoter la laine shetland, j'adore son côté rêche et la chaleur qui s'en dégage. Quant au coloris Automn, il est vraiment automne, tweedé de 1000 tons différents (j'exagère ? ), à chaque rang, on découvre de nouvelles nuances.
Mes aiguilles ont fait des noeuds, et ça m'a fait un noeud au cerveau. Regardez la belle erreur, tout en bas du tricot, sur le devant bien sûr (motif de gauche, partie supérieure du dessin). La honte !
Je me suis contentée de passer une aiguille double-pointe dans les deux mailles de mon brin qui devait passer par-dessus, mais à 1 m du bord de l'autre, et j'ai tricoté 3 rgs et grafté le quatrième :
Ca n'est pas parfait, ça ne peut pas l'être non plus car les mailles ont des bords libres et ne sont pas reliées à leurs voisines. Mais c'est un truc pour éviter de tout détricoter. Par contre, je pense qu'il vaut mieux prendre un numéro d'aiguille inférieur, car le fil est moins tendu, et mes mailles sont un peu plus grosses.
Sur ce, je m'en vais rêver aux vikings !
A bientôt, vale,
Christine